Un tabellion avait constaté les dégâts – ajouta M. de Villemur – mais, d’après ce que j’ai vu en arrivant, la promesse de Montluc a eu le sort de tant d’autres ; la tour n’a jamais été relevée, ni l’angle du corps de logis auquel elle attenait ; d’où s’en est suivie peu à peu, par la suite des temps, la ruine totale du château. Deux rivières à passer devant un ennemi supérieur en forces constituent des opérations très dangereuses ; et, en admettant que Montluc s’en fût tiré, ce n’eût pas été sans de grandes pertes qui lui auraient rendu l’offensive impossible. Il est temps de s’en préoccuper, en effet, dit l’ancien mestre-de-camp. En mettant un louis dans la main de Mme de Roquejoffre, interdite, M. de Villemur lui demanda la permission d’emporter les objets trouvés, puis il s’en retourna avec le juge. Le juge prévenu, l’étranger et Jouanny, porteur d’une scie, tous trois guidés par Blaise, allèrent droit au Bois-des-Huguenots, à travers pays. En chemin, le comte expliqua au juge et à Jouanny, qui les avait rejoints après avoir fait ses compliments à Mme Charlotte, qu’il était venu étudier le terrain et chercher des renseignements pour une relation de la bataille de Vern qu’il préparait.
« En résumé, reprit l’archéologue, l’affaire de Vern fut une déroute plutôt qu’une bataille. Après cette reconnaissance et les congratulations qui suivirent, M. de Villemur raconta que le 15 octobre 1562, le jour même de l’affaire de Vern, pendant qu’on jetait bas la tour à coups de canon, la dame de Roquejoffre avait fait une belle gésine d’un enfant mâle qui, en raison de cette circonstance, avait eu l’honneur d’avoir pour parrain le fameux Blaise de Montluc, dont le prénom avait été porté depuis par tous les premiers nés de Roquejoffre. La pauvre dame avoua sa détresse et déclara que, quant à ce qui la touchait personnellement, elle la supporterait comme par le passé ; mais que ce qui l’inquiétait et la tourmentait fort, c’était l’avenir de son fils… En route, l’ancien mestre-de-camp interrogea son guide et apprit que le château, à peu près ruiné, était pourtant encore habité par la dame de Roquejoffre, à qui il avait donné un louis. « Cela fait, continuant son chemin, il pouvait tomber sur Montpensier, qui venait à Mussidan avec peu de forces, et l’écraser.
Si, à ce moment, Duras avait fait face en arrière et fait marcher son infanterie, comme le lui conseillait Pardaillan, il est probable qu’il eût battu l’armée royale déjà ébranlée et égrenée sur un trop long parcours. En guise de dragées de baptême, le boucher catholique avait promis de faire réparer aux dépens de Sa Majesté les dommages causés par l’armée royale au château du sieur de Roquejoffre, qui servait comme volontaire dans la compagnie de gens d’armes de M. de Burie. Par petits pois nous n’entendons pas ce plomb de chasse venu de loin, et qui a la propriété de nettoyer l’estomac humain, comme le plomb des tonneliers nettoie les bouteilles. Cheneui, Semen canabis. Car aucuns nomment Cheneue, ce que nous appelons Chanure, Cannabis. Supérieur en forces à l’un et à l’autre séparément, il pouvait d’abord défaire Burie, qui était campé aux Mirandes, puis revenir attendre Montluc qui arrivait de Gascogne à marches forcées, l’attaquer au passage de la Dordogne et le rejeter dans la rivière.
Pensez-vous, monsieur, que nos députés aux États-Généraux obtiennent le rétablissement des États particuliers du Périgord ? Les États particuliers du Périgord ? Appelée scientifiquement Tuber melanosporum, la truffe noire du Périgord est sans conteste la variété la plus prestigieuse. Ce n’est plus de son âge, dit M. de Villemur. Je veux ne savoir plus distinguer un morion d’une bourguignote, si ce n’est pas là un parpaillot de Duras ! En arrivant, aussitôt après les premières politesses, M. de Villemur s’excusa de son mieux et mit sa méprise sur le compte d’une excessive distraction qui l’affligeait parfois, au point de le rendre incivil. Ce piquier, enjuché dans les branches, a dû être tué d’une arquebusade et tomber dans le creux du châtaignier où il est resté ! Le châtaignier éventré, les détritus enlevés, le squelette entier se vit affaissé au fond. Ce personnage ayant ouï le récit fait à Jouanny s’enquit de la direction et déclara aussitôt qu’il voulait aller examiner le squelette. ’écria l’archéologue en voyant la position du squelette. Ce souvenir faisait maugréer l’archéologue le long du chemin. Le lendemain, son portefeuille bourré de notes, M. de Villemur enfourcha son cheval devant l’hôtellerie de la « Cloche d’Or » et prit le chemin de Périgueux, après avoir fort recommandé à Jouanny, qui était venu lui souhaiter un bon voyage, d’envoyer toutes ses emplettes à son hôtel par le prochain messager.